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Les grandes lignes du matérialisme historique

Pour Marx et Engels le mot « matérialisme » désigne un point de vue spécifique de notre monde, exclusif de tout surnaturel. Une explication matérialisme, pour Marx, est fondée sur des  événements ou des processus naturels en ce que les organes des sens peuvent les appréhender. L’explication matérialiste de l’histoire, donc, décrit les événements ou les explique en termes de phénomènes naturels. Mais, dans la mesure où l’on peut comprendre l’histoire, nombreux sont les phénomènes  « naturels » que l’on peut mettre particulièrement en relief. Le climat, le sol, la vie végétale ou animale peuvent avoir(on l’a souvent soutenu) une influence prépondérante sur l’histoire humaine.
Ainsi pensent les tenants de la théorie géographique de l’histoire ; les partisans de la théorie biologique choisissant d’autres ordres de phénomènes comme la lutte biologique pour vie ou sa forme plus complexe de lutte pour la suprématie de l’espèce. D’autres enfin voient dans l’instinct sexuel ou dans sa répression le moteur de toute civilisation, ce qui constitue une théorie sexologique de l’histoire. Or toutes ces théories : géographique, biologique, sexologique, se rattachent sans doute au matérialisme historique, mais pas à celui de Marx ou d’Engels. Le leur, ils l’ont rapidement résumé en ces termes dans le Manifeste du parti communiste :
« Est-il besoin d’une grande perspicacité pour comprendre que les idées, les conceptions, les notions  des hommes, en un mot leur conscience change avec tout changement survenu dans leurs conditions de vie, leurs relations sociales, leur existence sociale ? »
« Que démontre l’histoire des idées, si ce n’est que la production intellectuelle se transforme avec la production matérielle. Les idées dominantes d’une époque n’ont jamais été que les idées de la classe dominante. »
« On parle d’idées qui révolutionnent une société tout entière : c’est énoncer seulement le fait que, dans le sein de la vieille société, les éléments d’une société nouvelle se sont formés et que la disparition des vieilles idées marche de pair avec la dissolution des anciennes conditions  d’existence. »
Le matérialisme historique expose la doctrine de la dépendance où se trouve la pensée par rapport aux conditions sociales sous deux formes qui sont au fond contradictoire. Selon l'une d'elles, la pensée serait tout simplement déterminée d'une façon immédiate par le milieu économique et le régime de la production dans lequel vivent les hommes. Il n'existe ni histoire de la science ni histoire des sciences particulières; leur évolution en effet ne présente aucun caractère autonome, étant donné que la façon de poser les problèmes et de les résoudre n'a pas été le résultat d'un mouvement intellectuel progressif mais simplement le reflet des conditions sociales de la production à chaque époque envisagée. Selon Marx, si Descartes considérait l'animal comme une machine, c'est qu'« il le regardait avec les yeux de la période de l'industrie manufacturière, tandis que l'homme du moyen-âge voyait en lui un auxiliaire – comme le fit plus tard Haller dans sa Restauration der Staatswissenschaft ». Dans la conception marxiste, les conditions de la production sont présentées comme des données totalement indépendantes de la pensée humaine. Elles « correspondent » à chaque moment « à un stade déterminé de l'évolution » des « forces productrices matérielles » ou, en d'autres termes, « à un certain stade de l'évolution des moyens de production et d'échanges »

          De la force productrice des moyens de travail « résulte » un ordre social déterminé. « La technologie révèle la position active de l'homme par rapport à la nature, le processus immédiat de production de sa vie, et par là aussi ses conditions d'existence et les représentations intellectuelles qui en découlent. » Marx n'a pas songé à l'objection qu'on aurait pu lui faire que les forces de production sont elles-mêmes un produit de la pensée humaine et que par suite on s'enferme dans un cercle vicieux quand on veut déduire la pensée de ces forces. Il était envoûté par les mots magiques « production matérielle ». Matériel, matérialiste, matérialisme, tels étaient les termes philosophiques à la mode à son époque, et il n'a pas su échapper à leur influence. Il considérait que sa plus haute mission philosophique consistait à remédier aux « défauts du matérialisme abstrait des sciences naturelles, qui ignore le processus historique », défauts qu'il croyait déjà découvrir dans les « constructions abstraites et idéologiques de ses représentants, dès qu'ils se hasardent en dehors de leur spécialité ». Et c'est pourquoi il qualifiait sa méthode de « seule méthode réellement matérialiste et par suite scientifique »

          Sous son deuxième aspect, le matérialisme historique présente la pensée comme étant déterminée par l'intérêt de classe. À propos de Locke, Marx dit: « qu'il représentait la nouvelle bourgeoisie sous toutes ses formes, les industriels contre les classes ouvrières et les paupers, les commerçants contre les usuriers à l'ancienne mode, les aristocrates de la finance contre les débiteurs de l'État, et que même dans une de ses oeuvres il présentait l'intelligence bourgeoise comme l'intelligence humaine normale ». Selon Mehring, le plus fécond des historiens marxistes, Schopenhauer est « le philosophe de la petite bourgeoisie affolée...; sa manière mesquine, égoïste et dénigrante, n'est que le reflet intellectuel de la bourgeoisie qui, effarée par le bruit des armes et tremblant comme la feuille, se confine dans sa retraite pour vivre de ses rentes et repousse comme la peste l'idéal de son époque ». Dans Nietzsche il voit « le philosophe du grand capital ».

          C'est dans le domaine de l'économie politique que cette attitude se présente sous son aspect le plus brutal. Marx a imaginé de distinguer parmi les économistes, les économistes bourgeois et prolétariens et cette distinction a été reprise par l'étatisme. Held explique la théorie de la rente foncière de Ricardo comme étant « simplement le produit de la haine des capitalistes d'argent contre les propriétaires fonciers »; pour lui, toute la théorie de la valeur de Ricardo ne saurait être considérée « que comme une tentative pour justifier la domination et le profit du capital sous les apparences d'une aspiration à une plus grande justice naturelle »(14). La meilleure réfutation de cette conception se trouve dans le fait que la doctrine économique de Marx n'est pas autre chose qu'un produit de l'école de Ricardo. Elle lui emprunte tous ses éléments essentiels, en particulier aussi le principe méthodologique qui sépare la théorie de la politique et la répudiation du point de vue éthique. Le système de l'économie politique classique a été mis à contribution à la fois pour défendre le capitalisme et pour le combattre, à la fois pour prêcher le socialisme et pour le condamner.

          Il en est de même du système d'idées de l'économie subjectiviste moderne. Incapable de lui opposer la moindre critique raisonnable, le marxisme cherche à s'en débarrasser en le clouant au pilori comme une « économie bourgeoise ». Mais le seul fait que certains socialistes se placent entièrement sur le terrain de la théorie du profit prouve que l'économie politique subjectiviste n'est pas « une apologétique capitaliste ». L'évolution de l'économie politique en tant que science est un processus intellectuel tout à fait indépendant des prétendus intérêts de classe des économistes et n'a rien à voir avec l'apologie ou la condamnation d'institutions sociales déterminées. Il est toujours possible d'abuser d'une théorie scientifique pour des buts politiques et l'homme de parti n'a pas besoin de l'adapter aux fins particulières qu'il se propose.

          Les idées du socialisme moderne ne sont pas sorties de cerveaux prolétariens. Elles sont nées chez des intellectuels, des fils de la bourgeoisie et non chez des travailleurs salariés. Le socialisme ne s'est pas emparé seulement de la classe ouvrière; il compte aussi des partisans avoués ou non parmi les possédants.
Les étapes de l'histoire :
Avec la conception matérialiste de l'histoire, on peut diviser l'histoire de l'Europe en quatre grandes phases de développement de la division du travail, en fonction de ses modes de production, auxquels correspondent certaines formes de propriété

1)      La propriété tribale
Le travail est effectué en commun, et ses fruits appartiennent à tous. Il n'y a pas de propriété privée. L'organisation sociale se réduit à l'extension de la famille: le chef de la tribu, ses membres, et les esclaves.
2)      L' antique propriété communale
 L'artisanat, l'agriculture et le commerce impliquent la division du travail. Les tribus se regroupent en villes. La propriété est communale, puis naît la propriété mobilière et immobilière. Il y a une opposition et une subordination entre les classes de citoyens et d'esclaves, et entre la ville et la campagne.
3)      La propriété féodale ( ou régime des ordres)
 Les rapports de production changent, l'esclave devient serf de la noblesse, qui est propriétaire des terres et des armées. Le christianisme est un élément fort de la superstructure, au service de la classe dominante. La Révolution française met un terme à la propriété féodale au profit de la propriété bourgeoise.
4)      La propriété bourgeoise ( ou capitalisme)

Elle est marquée par l'apparition des machines et des grandes industries, de la monnaie, et des marchés internationaux. La propriété sur les hommes n'existe plus, mais est remplacée par la subordination économique du salarié par rapport au bourgeois, propriétaire des moyens de production. On voit donc naître deux classes: les exploitants (la bourgeoisie) et les exploités (le prolétariat). Quel que soit le mode de production, deux classes sociales s'opposent - l'une dominante, l'autre dominée. La dialectique de l'histoire résulte des contradictions entre le développement des forces productives et les rapports sociaux, ainsi qu'entre celle des classes sociales et de la lutte entre leurs intérêts divergents.

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