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Quelle dynamique peut jouer la région au Maroc?


Avant de parler des dynamiques que peuvent jouer la région au Maroc avec des nouvelles dispositions de la loi-cadre 47-96  de la région, il faut dresser un bilan de la pratique régionale depuis l’indépendance, et  s’arrêter sur les conséquences et les causes de l’échec de cette pratique.

                I-Evolution de la régionalisation au Maroc :
C’est sous le poids, notamment des déséquilibres hérités de la période coloniale, que les pouvoirs publics ont manifesté un intérêt pour la région et la régionalisation. Trois faits majeurs qui caractérisent ces déséquilibres et justifient cet intérêt :
·         La création d’un déséquilibre entre un « Maroc utile » sur lequel se concentrait l’essentiel des infrastructures et investissements de l’économie coloniale et « un Maroc inutile » marginalisé
·         La prédominance du littoral atlantique moyen, entre Kenitra et Casablanca. C’est dans cet espace qu’existait l’essentiel des infrastructures de base et des activités économiques modernes et que se concentrait la majorité de la population urbaine du pays.
·         Fortes inégalités de développement opposaient les villes et les compagnes.
Depuis l’indépendance, les pouvoirs publics accorderont une grande importance et intérêt à la politique de la  régionalisation  notamment sur la base du Dahir 16/06/1971 qui détermine  le statut de région. La région était présente dans les plans de développement économique et social, surtout après l’adoption de ce statut, qui s’articulent autour des objectifs suivants :
·         La réduction des déséquilibres régionaux 
·         Le développement du monde rural
·         La poursuite de la politique de décentralisation et la déconcentration (Charte communale de 1976 )
·         La participation de la population à l’œuvre de développement.
·         L’amélioration de la gestion des institutions régionales et locales.
Malgré ces différents efforts, l’ensemble de ces outils n’est pas parvenu à contrebalancer la polarisation des villes atlantiques. Seule une évaluation de l’ensemble de l’expérience marocaine de la régionalisation peut  montrer les causes de l’échec de cette politique.
II-Evaluation de la politique régionale :
Les réformes structurelles entreprises par notre pays au cours des années précédentes n’ont pas pu contenir l’aggravation des inégalités socio-économiques intra et inter-régionales et des grandes déséquilibres spatiaux.
A-les conséquences de la politique régionale :
La disparité régionale ayant des implications qui se manifestent sur plusieurs niveaux :
                1-au niveau social : la carence en matière de certaines régions entraine un déplacement de la population vers les centres les plus riches créant de multiples problèmes à savoir : le chômage, problème de logement et des équipements publics divers. L’exode rural est l’expression des distorsions entre la ville et la compagne au profit de la première, ces distorsions s’expliquent par des ruptures d’équilibre population-ressources dans la compagne et aussi par la pratique de certaines politiques (Politique fiscale)
                2-Au niveau économique : les régions, profitant d’une infrastructure économique très importante au reste du pays, bénéficiaient d’une grande partie des investissements tant publics que privés. Cette situation freine le développement des autres régions qui subissent l’attraction des ces zones favorisées ; celles-ci en attirant les éléments les plus dynamiques des zones périphériques limitent en effet les possibilités de la promotion sociale et de développement économique de ces dernières. L’exode rural, qui touche les jeunes masculins, a entamé en gonflement du secteur tertiaire refuge et encore s’ajoute également le fait que la vente par les ruraux de leurs terres et leur départ à la ville conduisent à la substitution de la grande à la petite d’exploitation agricole.
                3-Au niveau politique : la disparité régionale donne naissance à des certaines actions revendicatives formulées par les régions pauvres qui menacent la stabilité interne
B-les causes de l’échec de la politique régionale :
l’observation, l’analyse, la constatation et le jugement même des responsables de la planification au Maroc concluent à la non efficience du système actuel. La modération des résultats s’explique par des facteurs structurels résident dans le statut même de la région (Dahir 16/06/1971) :
1-la centralisation des processus de décision :
La stimulation de la dynamique de développement a nécessité non seulement la mise en place des institutions mais aussi le concours de la population qui représente une condition vitale pour le développement. La mise en place des structures administratives au niveau local répond à ce dessin : sensibiliser et mobiliser  la population dont le but d’obtenir leur adhésion dans la réalisation des projets. La non participation de population n’est pas liée au seul model administratif, mais il y autres facteurs :
·         Un système politique très centralisé et hiérarchisé tempéré par une décentralisation timide.
·         Une administration dont le mécanisme de fonctionnement et gestion sont ignorés de l’administré.
·         Des fonctionnaires imprégnés de l’esprit d’autorité et du comportement de commandement
·         Une population qui demeure pour une grande majorité analphabète et très peu initié à la gestion des affaires publiques
Ajoutant également l’inefficacité des institutions régionales, notamment l’assemblée régionale consultatif(ARC), en parlant du Dahir 16/06/1971. Son activité a été marquée par une passivité presque totale tout au long de l’expérience régionale dont la mesure où des séances n’ont jamais été exclusivement réservées à la préparation ou au suivi de l’exécution du plan.
Du fait de l’organisation et du fonctionnement de l’assemblée régionale, il apparait clairement que la « mentalité régionale » cède le pas devant la « mentalité provinciale »
Il faut noter que la grande faiblesse de la réforme régionale de 1971 est d’avoir limitée les A.R.C à un rôle purement consultatif « l’A.R.C donne son avis sur tous les programmes de développement économique et social et d’aménagement du territoire intéressant la région… »Article 5 (Dahir 16/06/1971). Ajoutant, la non représentation des classes sociales les défavorisées dans L’A.R.C notamment des syndicats.
2-les élites locales facteurs de blocages :
Dans le cadre de l’aménagement du territoire, les programmes de modification qui nécessitait une restructuration socio-économique risque de buter sur l’opposition des élites locales. De ce fait, les effets de la politique de régionalisation peuvent être neutralisés par ces élites, alors elles agissent en toute conscience contre un changement en profondeur de structures.
3-D’autres facteurs s’ajoutent à savoir :
·         L’insuffisance de déconcentration spatiale.
·         La faiblesse des moyens financiers et humains mis à la disposition des administrations régionales
·         La rigidité et la lenteur des procédures
·         La faible configuration de l’espace national : manque des observatoires régionaux
Le diagnostic de l’expérience marocaine en matière de la régionalisation permet de relever que la relance de la région ne doit pas avoir seulement par but la mise en œuvre d’un simple mécanisme de planification et d’aménagement.  Elle doit suivre surtout à compléter le système politique administratif dans le pays et  de donner à la région un aspect décisionnel, pour mieux assurer sa consolidation et sa responsabilité  
III-les perspectives d’avenir de la région :
Depuis le discours royal de 20 Aout 1996 et l’adoption le 13/09/1996 par le peuple marocain de la révision constitutionnelle, la région a bénéficiée d’un nouveau cadre juridique (loi-cadre de la région 47-96). En janvier 2010, le roi du Maroc Mohammed VI a lancé à Marrakech le chantier d’une régionalisation avancée de la monarchie marocain. Toutes les régions du pays vont bénéficier de cette dynamique de régionalisation avancée et parmi les premiers bénéficiaires sera la région du Sahara.
A-La région : nouveau centre de décision :
La région doit devenir un élément important de la démocratie locale. Elle sera dotée d’un organe délibératif à savoir le conseil régional, composé des représentants élus de toutes les catégories sociales (Collectivités locales, chambres professionnelles et les salaries).
1-les compétences de la région :
Les nouvelles dispositions de la loi cadre 47-96 de la région étendent les compétences et attributions du conseil régional à certains secteurs clés jadis dévolus aux attributions exclusives du gouvernement central à Rabat, aussi, ile exerce des compétences propres et des compétences qui lui sont transférées par l’Etat.
En ce qui concerne les compétences propres, le conseil régional exerce de nombreuses attributions parmi lesquelles.
·         Il vote le budget, examine et approuve les comptes administratifs.
·         Il élabore le plan de développement économique et social de la région conformément aux orientations et objectifs retenus par le plan national de développement.
·         La participation financière de la région aux entreprises mixtes
·         Protection de l’environnement
·         La formation professionnelle
Quand aux compétences qui pourront lui être transférés par l’Etat, on peut citer :
·         Formation des agents et des cadres des collectivités locales
·         Réalisation des lycées, d’établissements universitaires et transfert de compétences ou des charges de l’Etat aux régions nécessite l’octroi des moyens humains, matériels et financiers
2-les moyens d’action :
Pour que la région puisse réaliser ses objectifs, il faut lui accorder des moyens de nature financière et humaine.
                a-les moyens financiers :
                le problème de la dépendance financière des collectivités locales vis-à-vis des finances de l’Etat est le résultat de la faiblesse et des insuffisances des ressources propres de ces collectivités.
                L’autonomie financière doit être établie à partir des principes politiques qui ont inspiré l’œuvre de décentralisation. Il faut reconnaitre aux collectivités locales un minimum de pouvoirs réels de décision dans leur gestion financière qui  s’exercerait dans un cadre légal préalablement établit à l’échelon national.
·         Les collectivités locales doivent disposer de ressources propres en quantité suffisantes.
·         Les collectivités doivent déterminer leurs recettes et leurs dépenses, fixer des taux d’impôt.
·         Les collectivités doivent supporter un contrôle exercé à posteriori.
L’autonomie financière est une condition nécessaire pour la réussite de la régionalisation au Maroc.
b-les moyens humains :
La concrétisation d’un tel projet n’est possible que s’elle acquiert l’adhésion et la mobilisation des hommes. Si l’on veut que la région puisse jouer le rôle d’échelon fondamental dans la conduite des politiques d’aménagement de l’espace, il est essentiel de les doter  des moyens humains nécessaires. Les élus ne pourrait décider que s’ils peuvent s’appuyer sur des dossiers préparés au niveau régional par une cellule pluridisciplinaire groupant des cadres peu nombreux, mais de très haute qualité.
B-La dynamique de nouvelle région :
La région comme centre de décision économique est porteuse de nouvelles dynamiques qui se visualisent sur deux éléments :
1-l’intervention économique :
La région, sous l’effet de l’importance de son territoire et ses activités socio-économiques et le poids démographique permet de jouer un rôle fondamental dans la stratégie économique de développement. Elle pourrait instaurer des rapports étroits avec les Universités, les entreprises et les autres collectivités, et de développer des interventions économiques directes et indirectes.
Les interventions directes porteront notamment sur :
·         La création des sociétés de développement et d’aménagement régional.
·         La participation aux entreprises de l’économie mixte.
·         L’aménagement des zones industrielles de dimensions importantes.
·         La promotion des zones d’activités économiques.
·         L’accord d’emprunt à la création ou extension des entreprises vitales pour la région à des conditions avantageuses .
Les interventions indirectes des régions peuvent concerner :
·         L’octroi des aides et primes conditionnelles à l’investissement
·         L’attribution des primes à la création d’emploi.
·         Le soutien financier à la création et restructuration des entreprises vitales (PME-PMI)
·         L’amélioration de l’environnement d’ensemble des entreprises
2-la coopération inter et intra-régional
L’élargissement du champ d’action économique des régions nécessite l’adoption d’une charte nationale de l’inter-coopération à fin d’associer les volontés  et d’harmoniser les projets et les moyens de l’ensemble des collectivités locales, des entreprises publiques et privées, des universités et centre d’étude. Les régions peuvent promouvoir un développement économique, social et culturel en mettant en valeur la diversité de leurs potentiels et en s’associant aux autres régions pour réaliser en commun et dans la complémentarité des projets et des programmes d’envergure suprarégionale. C’est l’exemple de la sauvegarde de l’environnement, de la mobilisation des ressources en eau et leur transfert entre régions, du développement des infrastructures liées au transport(Autoroutes, ports, aéroports…), la création de grands parcs ou centres technologiques, des réseaux régionaux d’innovation. A l’interieur de la région , elle doit s’impliquée dans les processus de coopération interprovinciales et intercommunale afin de réunir les conditions de réalisation d’un développement intégré au niveau régional et décentralisé au niveau local avec la participation des citoyens et de tous les acteurs locaux.
Bibliographie :
·         REMALD, série « Thèmes actuels »,n°8,1996
·         CNJA « Bilan de la pratique de régionalisation au Maroc »
·         La nouvelle région économique au Maroc : dynamiques et enjeux , M’hamed Zriouli
                                                                          



1 commentaire:

  1. C'est un excellent article qui résume l'évaluation de la politique régional.

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