Les modèles
mathématiques pénètrent tous les secteurs de la finance moderne : gestion de
portefeuilles, évaluation des produits dérivés, « régulation prudentielle » des
banques, normes de contrôle et de gestion des risques. Pourtant, selon la
formule d’un communiqué récent de l’Académie des sciences française, «leur rôle
est mal connu, souvent surévalué, parfois diabolisé ». Ce débat a pris une
tournure particulière dans les médias français. Dans un élan étrange qui tient
plus du règlement de compte avec les mathématiques, instrument controversé de
sélection dans le système éducatif français, les médias en France ont accusé
les mathématiques financières d’être la cause de nos maux, en citant pêle-mêle
la formule de BlackScholes et la surmathématisation de l’économie... Des propos
faciles qui, en gonflant le rôle des modèles quantitatifs, évitent de réfléchir
aux racines économiques de la crise.
L’origine de
la crise financière actuelle se trouve dans l’éclatement de la bulle
spéculative immobilière aux États-Unis. Loin d’être un phénomène « sans
précédent », comme on a pu l’entendre, cette crise répète un schéma familier
pour les économistes et a connu de multiples précédents historiques, bien avant
l’apparition des « mathématiques financières » ou du moindre produit dérivé.
En finance,
les modèles mathématiques servent à mesurer et quantifier le risque des
investissements. À ce titre, ils jouent le rôle d’outils d’aide à la décision
pour les gestionnaires, les investisseurs et les régulateurs. Mais, à de rares
exceptions près, une banque ou un fonds d’investissement ne fonde pas une
décision majeure d’investissement sur une formule mathématique. La décision,
pour les banques d’investissement américaines, d’investir massivement dans les
prêts risqués (les « subprimes ») était motivée par la recherche de
rentabilités toujours plus grandes, elle ne s’appuyait pas sur un modèle
mathématique.
Mais, même
si les modèles mathématiques ne sont pas à l’origine de cette crise, celle-ci a
mis en évidence un certain nombre de défaillances dans la gestion et la
modélisation des risques dans les banques, les agences de notation, les
systèmes de régulation et les institutions financières. S’agit-il d’une
défaillance des méthodes quantitatives, d’une mauvaise utilisation de ces
méthodes ou de la non-utilisation des méthodes disponibles ?
La finance
est une discipline quantitative par essence: le calcul des profits et des
pertes d’investissements, des intérêts sur les prêts, etc., fait intervenir des
mathématiques. Leur niveau se complique dès lors qu’on s’intéresse non plus aux
profits et pertes passés, mais futurs : il faut alors quantifier l’incertitude
sur les mouvements futurs de prix à l’aide des probabilités et des
statistiques. Le premier à relever ce défi fut le mathématicien français Louis
Bachelier qui, en 1900, modélisa les variations des prix boursiers comme des
variables aléatoires indépendantes, avec cette proposition assez
révolutionnaire pour une époque où la science baignait dans le déterminisme
laplacien : « Le marché n’obéit qu’à une seule loi : la loi du hasard. » lire le document complet
D’après un document écrit par l'auteur Rama CONT directeur
de recherche du CNRS
au Laboratoire
de probabilités et modèles
aléatoires (Université
Paris VI-VII) ;
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